Nous avons visité différentes chaines d’hôpitaux, des magasins, rencontré une quinzaine d’entreprises et échangé avec les experts sur différents sujets macroéconomiques (infrastructure, immobilier, transformation digitale). Cette visite a confirmé notre sentiment que l’économie n’est pas immune aux risques exogènes : la hausse des cours des matières premières et de l’énergie pèse sur l’inflation, à 7% actuellement, et pousse la banque centrale à augmenter son taux directeur (+50pb en juin à 4,9%). En revanche, nous sommes revenus plus confiants sur la croissance structurelle du pays. Le gouvernement indien est bien déterminé à bénéficier du changement de l’ordre mondial. La question reste de savoir quelle place l’Inde peut-elle prendre sur l’échiquier mondial. Dans le secteur industriel nous avons rencontré les équipes dirigeantes de Reliance Industries, Larsen & Toubro, Hindalco Industries, GAIL et Amber Enterprise. Nous avons échangé avec le président du groupe Aditya Birla (46 Md$ de CA). Dans le secteur de la consommation, nous avons rencontré Varun Beverage, Maruti Suzuki, Aditya Birla Fashion & Retail, Havells et Zomato pour la livraison de plateaux repas. Dans le secteur hospitalier nous avons visité Max Healthcare, Fortis et Medanta.
Depuis l’élection de Narendra Modi en 2014, l’économie indienne a subi une série de chocs. Tout d’abord la démonétisation (élimination des petites coupures) et l’homogénéisation de la TVA ont affecté le secteur informel, responsable à l’époque de plus de 85% de l’activité économique. Après avoir pesé sur la croissance, ces réformes se traduisent aujourd’hui par de meilleures recettes fiscales, une croissance du secteur formel plus rapide et une consolidation de nombreux secteurs économiques. La logistique est par exemple encore citée comme un des principaux freins aux investissements. En effet, le coût logistique représente 14% du PIB indien contre 7-9% dans les pays développés. Le gouvernement a pour objectif de ramener le seuil à 10% d’ici 2027. Parmi les projets, la construction d’un rail dédié au transport de marchandises long de 3500 km reliant Delhi au port de Mumbai à l’ouest et Ludhiana à Calcutta en passant par Delhi à l’est. La livraison du projet est prévue pour 2023. Alors que l’Inde jouit du 3ème réseau ferroviaire le plus long du monde (66 000 km), il est essentiellement utilisé pour le transport de passagers (65% des volumes). Dans le cas du fret, le transport par rail représente 35% des volumes domestiques et 20% des volumes import-export. Or pour des distances au-delà de 300 km, le transport par rail est plus efficient en temps et en coût. Ce projet est à même d’accompagner l’ambition du gouvernement de devenir un hub manufacturier et de porter les exportations de 440 Md$ actuellement à 1 Tr$ d’ici 2030. Plusieurs initiatives du gouvernement sont à l’œuvre :
1/ l’impôt sur société porté de 25% à 15% pour les nouveaux investissements industriels ;
2/ un plan de subvention, dit PLI Scheme, dans 18 secteurs clés où le gouvernement va investir 35 Md$ afin d’augmenter la localisation.
A titre d’exemple, le gouvernement souhaite devenir un hub dans l’hydrogène. Total Energies vient d’ailleurs d’annoncer l’achat d’une participation de 25% dans une JV avec Adani Group ayant pour objectif d’investir 50 Md$ pour produire 1 million de tonnes d’hydrogène vert[1] d’ici 2030.