- Ce début de semaine a été marqué sur les marchés par une liquidité très limitée, en raison de la fête nationale américaine hier et à l’approche des chiffres décisifs de l’emploi américain et de l’ISM services. Dans ce contexte, les taux d’intérêt sont restés soumis à des pressions haussières en anticipation d’une poursuite du resserrement monétaire cet été. Les taux 2 ans atteignent des plus hauts depuis mi-mars des deux côtés de l’Atlantique. Les actions sont restées plutôt stables après leur hausse la semaine dernière, et elles restent à des niveaux élevés compte tenu de la hausse des taux et des signes de récession marquée dans l’industrie.Suivre le cycle économique peut s’avérer d’autant plus complexe que des chocs inattendus peuvent venir affecter la conjoncture. Les émeutes que nous connaissons en France peuvent faire craindre un impact important sur l’activité. Toutefois, à ce stade, en dépit de dégâts matériels très importants et même de la paralysie de certaines activités de commerce, l’impact économique général devrait être limité, d’autant plus si la situation s’apaise vite. Plus cette crise durera, plus l’impact sur la confiance des agents économique pourrait être fort et changer négativement le comportement de dépense et donc nuire à l’activité. Mais, encore une fois, il est difficile de considérer que l’impact économique sera notable.
- Le PMI manufacturier global pour juin a baissé de 49,6 à 48,8pt, retrouvant ses niveaux de fin 2022 clairement en zone de contraction. Cette faiblesse de l’industrie est généralisée en terme géographique et devrait se poursuivre cet été. La bonne nouvelle est que cela réduit les tensions sur le prix des biens industriels qui baissent depuis 2 mois pour la première fois depuis mi-2020.
- D’un côté, la faiblesse de l’industrie cette année était attendue car la demande se rééquilibre entre les biens et les services et parce que l’industrie est plus sensible au resserrement monétaire que l’activité des services. D’un autre côté, cette faiblesse est plus importante qu’attendue dans un contexte où les chaînes de production mondiales se sont normalisées et où la réouverture de la Chine était censée tirer la demande mondiale.
- Mais les PMI chinois de juin confirment le ralentissement marqué de la reprise au cours du 2ème trimestre, ce qui nécessite de nouvelles mesures concrètes de soutien des autorités qui se font encore attendre. Les PMI manufacturiers restent stables en juin sous la barre des 50 points et les PMI des services baissent nettement après leur rebond du début d’année. Ainsi le PMI services publié par S&P Global passe de 57,1 à 53,9pt, revenant juste en ligne avec sa moyenne historique.
- Si l’économie américaine résiste mieux que celle du reste du monde à l’approche de l’été, elle n’est pas épargnée par la faiblesse de l’industrie. L’ISM manufacturier baisse en juin à 46,0pt, son plus bas niveau depuis le confinement global de mi-2020. Cela dit, l’activité industrielle ne représente que 12% du PIB américain, qui reste bien plus dépendant des services.
- En tout état de cause, ce qui importe pour juger de la conjoncture mondiale cet été et des perspectives de politique monétaire sera plus que jamais la dynamique dans les services et sur les marchés de l’emploi. Les dernières données suggèrent que l’emploi résiste malgré un ralentissement des services en Europe en juin. Cela va dans le sens de notre scénario qui intègre une croissance plus faible dans la seconde partie de l’année, surtout aux Etats-Unis. En effet, les soutiens temporaires du début d’année (baisse du prix des matières premières, réouverture de la Chine…) devraient s’essouffler alors que l’impact des resserrements des politiques économiques sera croissant.
- Dans ce contexte, les publications de l’ISM pour les services demain et des créations d’emplois vendredi seront suivies de près. Il nous semble qu’il faudrait une forte dégradation de ces indicateurs pour empêcher la Fed de remonter de nouveau ses taux en juillet après sa pause de juin. C’est ce que devraient confirmer les minutes de la réunion de juin, durant laquelle les membres de la Fed ont décidé de faire une pause mais d’indiquer deux hausses de taux supplémentaires d’ici la fin de l’année.
Fig. 1 Monde : Le PMI manufacturier global repasse nettement en zone de contraction en juin
Le PMI manufacturier global baisse de 49,6 à 48,8pt, retrouvant ses niveaux de fin 2022 clairement en zone de contraction. A ce niveau, il est cohérent avec un rythme de contraction de 1% de la production industrielle mondiale, qui avait rebondi de 4% au T1 grâce à la réouverture de la Chine et à la normalisation des chaines de production.
Et la faiblesse du cycle industriel mondial est généralisée puisque le PMI manufacturier baisse et est sous les 50pt dans plus des deux tiers des pays couverts par l’enquête en juin.
Fig. 2 Monde : Les indicateurs avancés restent mal orientés pour l’été
Les indicateurs avancés restent mal orientés pour l’industrie cet été, même s’ils ne sont pas aussi faibles que fin 2022. Les nouvelles commandes baissent plus que la production en juin, contribuant à réduire les carnets de commandes et les perspectives de production passent sous leur moyenne de long terme. Cela pèse sur la confiance des industriels qui réduisent leurs achats et cessent d’embaucher en juin. Cela dit, ils réduisent déjà fortement leurs stocks, ce qui est positif pour la production, plus tard dans l’année, si la demande commence à se stabiliser.
Fig. 3 Monde : Au moins les prix baissent enfin nettement dans l’industrie
La bonne nouvelle est que les prix commencent à baisser dans l’industrie, ce qui est positif pour l’inflation dans les biens industriels. Les prix des intrants comme les prix de ventes baissent légèrement depuis deux mois, pour la première fois depuis mi-2020. Et si le ralentissement des prix dans l’industrie s’expliquait principalement par la baisse du prix des matières premières depuis l’été dernier, c’est rassurant de voir que ce ralentissement s’intensifie malgré la stabilisation du prix des matières premières en juin. Cela suggère que c’est désormais la faiblesse de la demande qui permet une détente des prix, ce qui est le mécanisme que l’on s’attend à voir après les resserrements des politiques monétaires depuis plus d’un an.
Fig. 4 Etats-Unis : L’ISM manufacturier est au plus bas depuis mi-2020
Si l’économie américaine résiste mieux que les économies européennes à l’approche de l’été, elle est tout de même touchée par la faiblesse industrielle. L’ISM manufacturier baisse en juin à 46,0pt, un nouveau plus bas depuis le confinement global de mi-2020. Un niveau d’ISM si bas a depuis les années 1970 toujours été suivi pas une récession dans l’année qui suit, sauf en 1995. Cela dit, les indicateurs avancés s’améliorent légèrement car les stocks s’ajustent très rapidement. Surtout, la résilience de l’économie américaine dépend plus des services, qui représentent les trois-quarts du PIB contre 12% pour le secteur manufacturier et qui sont censés surperformer cette année.
Pour juger de l’état de l’économie américaine, et pour la Fed, les publications de l’ISM services et des rapports emplois demain et vendredi seront très importantes. Nous attendons une confirmation du ralentissement seulement graduel de l’activité dans les services et de la persistance des tensions élevées sur le marché du travail. Nous pensons qu’il faudrait des chiffres très décevants pour remettre en cause la hausse de taux attendue pour la réunion du 26 juillet.