- La guerre continue en Ukraine, créant toujours des incertitudes sur l’évolution des prix des matières premières, notamment sur l’énergie. Le probable embargo que pourrait décider l’Union européenne sur le pétrole russe d’ici la fin de l’année où l’éventualité d’une coupure des approvisionnements par la Russie, pose évidemment de véritables difficultés aux Européens pour éviter d’éventuelles pénuries énergétiques. À ce stade, il est difficile encore de voir comment les pays les plus dépendants du pétrole russe peuvent trouver des alternatives en si peu de temps. De ce fait, le prix du pétrole devrait rester élevé, car cette incertitude devrait maintenir la pression sur les ressources pétrolières existantes au niveau mondial, en faisant l’hypothèse qu’une partie du pétrole russe ne trouverait pas preneur ou que la production russe devra être limitée par des contraintes techniques associées aux sanctions. En ce sens, à moins d’un changement radical dans la stratégie de la Russie, il est maintenant très probable, que la contrainte énergétique, notamment en Europe risque de continuer à peser sur la croissance.
- Aujourd’hui, la décision que prendra la Fed aura évidemment une influence considérable sur les marchés. Alors que depuis 1 mois, les autorités monétaires ont clairement souligné l’urgence de normaliser leur politique très rapidement, il serait sûrement contre productif de créer plus de désordre dans le chemin de sortie, d’autant plus vu les incertitudes qui pèsent sur l’économie mondiale. C’est pour cela que nous défendons, comme la plupart des acteurs de marché, une hausse forte des taux de 50 points de base plutôt qu’une montée beaucoup plus rapide, disons par exemple de 75 points de base comme certains membres du comité de politique monétaire semblent le suggérer. En partie, notre position tient à la « réussite » de la communication faite au marché jusqu’ici, qui a conduit à un changement radical dans les anticipations des perspectives de hausses de taux directeurs pour l’année à venir et donc de hausse des taux à long terme, dont le taux à 10 ans sur les obligations d’Etat (Treasuries) à près de 3%, soit le taux le plus haut depuis fin 2018. Ceci a donc déjà permis un resserrement des conditions financières. Si la Fed ne veut pas casser la croissance et veut réussir son atterrissage en douceur, elle doit éviter un resserrement trop brutal. Ceci d’autant plus que comme il semble déjà acquis la Fed devrait annoncer le début de la réduction de son bilan, le plus probable dès le mois de juin. Au total, on ne peut pas complétement exclure une hausse de 75pb, mais la raison devrait amener la Fed à une hausse forte, mais plus modérée de 50 pb, une hausse jamais vue depuis l’année 2000.
- Evidemment, devant les nombreuses incertitudes qui pèsent sur les perspectives économiques, les marchés restent volatils d’autant plus que pendant cette saison des résultats des entreprises, si bien une majorité d’entreprises ont montré encore une fois des performances solides, beaucoup donnent des perspectives très mitigées, soulignant les hausses des coûts et les contraintes d’approvisionnement qu’elles subissent, sans oublier la détérioration de la croissance chinoise due aux mesures de restriction de la mobilité très strictes qui sont mises en place. Néanmoins, sauf nouveau choc sur les matières premières à cause due à la guerre en Ukraine, pour l’instant la croissance mondiale tient. Certes, le trou d’air chinois, qui se voit déjà et qui devrait s’approfondir encore sur au moins le mois à venir, va peser à court terme. Mais, nous pensons qu’une légère embellie devrait voir le jour en Chine avant l’été et probablement une accélération plus prononcée se manifestera au cours du 3T22. Entretemps, malgré la décélération forte du 1T22 des deux côtés de l’Atlantique, on pense qu’un rebond graduel devrait s’opérer au cours du 2T22 et s’accélérer au 3T22, même si la décélération des économies pour les 12 mois qui viennent nous semble acquise. Pour l’instant, la croissance tient, même si nous somme clairement sortis de la séquence euphorique de croissance de l’après crise sanitaire et du « quoi qu’il en coûte » du point de vue de la politique économique. Si se voit déjà clairement dans les indicateurs PMI[1] mondiaux pour l’industrie
- Dans ce contexte, les marchés vont rester volatils, comme le reflète d’ailleurs la persistance des mesures de volatilité sur les marchés actions (le VIX[2], par exemple aux Etats-Unis), qui depuis le début de la guerre en Ukraine restent à des niveaux élevés. De ce fait, la prudence devrait l’emporter encore pour un temps dans le positionnement des portefeuilles. Nous continuons à privilégier une position plus défensive qui s’exprime essentiellement dans nos choix sur les secteurs, alors que notre surpondération sur les actions est plus modérée. En revanche, nous restons très prudents sur l’ensemble du segment obligataire. Une partie de notre « budget » de risque nous le maintenons sur le marché chinois, qui a été déjà très décoté. Tout en étant conscients de la difficulté d’entrevoir la sortie totale des restrictions sanitaires mises en place aujourd’hui, nous pensons qu’un rebond très net devrait voir le jour en Chine avant l’été, que le marché tentera d’anticiper.
L’économie mondiale, malgré les nombreux chocs qu’elle subit reste relativement robuste, comme le montrent les indicateurs PMI de l’industrie. En effet, malgré une Chine ou l’activité industrielle se contracte à cause des restrictions massives de la mobilité, l’activité industrielle mondiale résiste. L’indicateur manufacturier mondial de JP Morgan, qui regroupe l’ensemble des PMI du secteur manufacturier publié dans le monde pour le mois d’avril est certes en retrait, mais le niveau reste toujours historiquement élevé. Par ailleurs, une partie de cette baise s’explique, comme indiqué par le fléchissement de la Chine. Ailleurs, l’activité reste plutôt robuste, même si encore une fois, elle fléchit.
Concernant les perspectives, nous pensons que l’activité devrait rebondir en Chine à partir de l’été. Néanmoins, dans le reste du monde, notamment des deux côtés de l’Atlantique, il est vraisemblable que la décélération va se poursuivre encore.
La décélération sera d’autant plus forte que la demande sera affectée par, d’une part, des conditions financières, plus sévères et d’autre part, de façon cruciale par l’impact de l’inflation sur le comportement de consommation des ménages et d’investissement des entreprises. Évidemment, les incertitudes associées à la guerre en Ukraine peuvent aussi affecter les comportements des acteurs économiques. En même temps, n’oublions pas que la dynamique d’ouverture des économies occidentales et de certains pays émergents qui sortent de la crise pandémique devrait toute de même s’avérer porteuse.
De manière cruciale pour que la demande reste robuste, il faudra suivre l’évolution de l’emploi. Aux Etats-Unis, comme en Europe, nous voyons toujours des marchés du travail qui restent très porteurs. Néanmoins, il nous faudra rester vigilants sur leur évolution dans les mois à venir, car l’affaiblissement de ceux-ci sera une indication cruciale pour s’assurer que la croissance est préservée.
On attend en fin de semaine les chiffres de l’emploi américain pour le mois d’avril. Il est probable qu’il est resté robuste et que le taux de chômage a continué à reculer, et sûrement retrouvé le niveau d’avant crise. Les mois qui viennent nous donneront plus d’information quant à la résilience de l’économie américaine.
Quoi qu’il en soit les américains continuent d’être très actifs dans leur recherche d’emploi et sont toujours confrontés à un marché très tendu qui les pousse à quitter leurs emplois actuels pour trouver des meilleurs salaires. Ainsi, la mesure du ministère du travail américain sur les travailleurs qui quittent leur emploi de manière volontaire reste à un niveau historiquement élevé.