- Alors que la guerre se poursuit en Ukraine, les pays Européens ont adopté des nouvelles sanctions contre la Russie suite aux exactions découvertes dans la ville de Boutcha. La plus emblématique est un embargo sur les importations de charbon russe. Un peu moins de 50% du charbon importé par l’Union européenne provient de Russie. Il est anticipé que les Etats-Unis puissent se substituer à la Russie. Aussi, 4 banques supplémentaires ont été incluses dans la liste de banques ne pouvant pas mener des transactions par le système SWIFT.
- L’Allemagne a présenté un nouveau programme de transition énergétique afin d’accélérer celle-ci. L’objectif principal est d’atteindre le net zéro en 2045. Ceci passera par l’ambition d’atteindre 80% d’utilisation d’énergie renouvelable pour produire son électricité en 2030 et 100% en 2035. En 2020, le pourcentage était de 41,1%. Ces cibles semblent extrêmement ambitieuses et difficilement atteignables.
- La Chine maintient sa politique de « tolérance zéro » concernant la Covid, avec toujours la ville de Shanghai partiellement confinée. Mais d’autres villes subissent le même sort. Plus cette politique est poursuivie plus on devrait voir un impact marqué sur la croissance chinoise et plus on verra le risque d’une augmentation de goulets d’étranglement dans l’approvisionnement des entreprises au niveau de certains biens au niveau mondial.
- Le compte-rendu de la réunion du comité de politique monétaire de mars dernier de la Fed a permis de donner plus de clarté sur sa stratégie de réduction de son bilan. Les 9 mille milliards de dollars d’actifs détenus par la Fed pourraient être réduits de 95 milliards par mois, soit à peu près de mille milliards de dollars par an. Ceci devrait permettre l’accélération du resserrement monétaire. Néanmoins, l’impact direct sur l’évolution des taux d’intérêt reste incertain. Pour l’instant, la possibilité d’une réduction plus rapide du bilan s’est traduit par une nouvelle montée des taux longs. Le taux américain a atteint 2,65%, un plus haut depuis mars 2019. Le taux 10-ans allemand a, lui, atteint 0,68%, un plus haut depuis février 2018.
- Les marchés financiers français restent encore sous pression suite à l’incertitude crée par le dénouement des élections présidentielles. Alors que le taux à 10-ans entre la France est l’Allemagne s’est écarté au cours de la dernière semaine, se sont surtout certaines valeurs spécifiques en bourse, dont les banques, qui subissent un fort impact avec une très importante sous-performance par rapport à leurs homologues européennes.
L’Europe a finalement décidé d’introduire des sanctions à l’encontre de la Russie touchant à l’énergie. En effet, jusqu’à maintenant, il y avait eu un refus, notamment de la part de l’Allemagne, de restreindre les importations des produits énergétiques russes, car la dépendance de l’Union européenne à la Russie est extrêmement élevée.
Il semblerait que des voies de substitution aient déjà commencé à être étudiées pour éviter d’introduire un choc trop important. Les Etats-Unis pourraient être un des grands bénéficiaires de cet arrêt des importations de charbon en provenance de Russie.
Est-ce que cet embargo sera étendu au pétrole et au gaz ? À ce stade, cela ne semble incertain.
Notons, toutefois, que selon certaines études, dont celle très récente du Conseil d’Analyse économique, l’impact d’un embargo partiel ou total pourrait être bien moindre que ce qui pourrait faire penser la très forte dépendance de l’Europe en termes d’approvisionnement énergétique en provenance de Russie. En effet, en utilisant un modèle sectoriel et en prenant les effets possibles de substitution, notamment, selon la dépendance énergétique des pays, l’impact économique pourrait être relativement faible.
Ainsi, selon ces estimations, l’impact sur le PIB français serait compris entre une baisse de 0,1% et 0,3% et pour l’Allemagne de 0,3% à 3%. Pour cette dernière, vu sa dépendance à la Russie, l’impact est évidemment beaucoup plus important. C’est d’ailleurs le car pour tous les pays très dépendant de l’UE.
Ces résultats semblent cohérents avec de cas de chocs énergétiques importants, comme par exemple la catastrophe de Fukushima au Japon.
Néanmoins, les hypothèses de substitutions et surtout la rapidité à mettre en place les ressources nécessaires qui remplaceraient celles perdues, notamment pour le gaz, peuvent être bien plus longue qu’estimées. En outre, le risque existe que le choc soit plutôt dans la fourchette supérieure et entraîne donc une forte récession en Europe. Un risque que les autorités européennes ne semblent ne pas vouloir prendre pour l’instant.
Par ailleurs, soulignons que la Russie serait déjà en train de négocier avec certains pays dont la Chine et l’Inde pour exporter notamment son pétrole et trouver des débouchés alternatifs à l’Europe. Mais, ceci se ferait avec des réductions de prix assez considérables selon certaines informations de presse. En même temps, ces transactions ne se feraient pas en dollars. Elles pourraient être effectuées en Roubles, Yuans ou Roupies. Toutefois, le coût économique pour la Russie resterait très important, même si des liquidités seraient toute de même rendues disponibles, même si essentiellement pour des transactions bilatérales.
La publication du compte-rendu de la réunion de politique monétaire de la Fed en mars dernier, a mis en évidence la volonté de la Fed de commencer la réduction de son bilan plus vite qu’anticipé. Ceci est en ligne avec les commentaires de certains gouverneurs depuis quelques jours. L’idée qui semble dominer le débat est une réduction du bilan qui commencerait plus tôt que ce qui était prévu précédemment (l’anticipation de marché était plutôt vers juillet.) et qui serait effectué plus rapidement que celle qui avait eu lieu entre 2017-2019.
Les membres du comité sont allés dans les détails techniques de comment procéder dans cette réduction du bilan, en ayant à l’esprit d’éviter que la réduction n’entraîne pas des dislocations sur les marchés des obligations d’Etat (Treasuries) ni sur le marché celui des valeurs hypothécaires (MBS).
Apparemment, un accord semble déjà exister dans le comité sur les seuils de vente des actifs. Ainsi, l’idée serait de commencer par une réduction mensuelle de 60 milliards de dollars les détentions de Treasuries et de 35 milliards de MBS. Ces ventes pourraient aussi s’étaler sur trois mois, donc avec des montants différents par mois selon les conditions de marché.
Si un tel dispositif était adopté, les détentions d’actifs de la Fed seraient donc réduites d’un peu plus de mille milliards de dollars sur les 12 mois à venir.
Il est important de noter que vu le stock d’actifs détenus par la Fed, cette réduction du bilan prendra longtemps.
Aussi, la gestion de la politique monétaire devrait continuer dans le cadre adopté depuis la décision d’utiliser le bilan pour assouplir les conditions monétaires, soit le maintien d’un niveau très large de réserves bancaires auprès de la Fed.
Mais même revenir au niveau d’actifs qui avait atteint en 2019, même en l’ajustant, de la croissance du PIB, car les réserves devraient croître avec l’économie, prendra du temps.
Évidemment, la question à laquelle il reste très difficile de répondre est quel sera l’impact de la réduction du bilan sur les taux d’intérêt ? L’idée triviale qui consiste à penser que comme l’achat de Treasuries a permis une baisse des taux, la réduction du bilan devrait « automatiquement » se traduire par une hausse des taux n’est pas forcément juste.
Pour l’instant, les commentaires de certains gouverneurs, dont Mme Brainard qui devrait être confirmée comme numéro deux de la Fed prochainement, d’un début de réduction du bilan dès le mois de mai s’est bien traduit par une très forte poussée des taux d’intérêt, notamment sur les maturités à long terme vers le haut. Sur la semaine, le taux à 10-ans américain est monté de plus de 25 points de base !
Néanmoins, notons que lors du dernier épisode de réduction du bilan, les taux longs ont eu tendance à plus baisser que monter. Il est évident que la réduction du bilan de la Fed, avec donc notamment le retrait du marché des Traesuries d’une « main » très forte, devrait avoir tendance à tendre les taux. Ce sont aussi les circonstances où se mouvement s’opère qui est tout aussi important.
Aujourd’hui, avec les très hauts niveaux d’inflation que nous connaissons et une croissance qui reste robuste, malgré la décélération anticipée, il est probable que ce début plus rapide de la baisse du bilan vienne encore peser sur les taux longs. Beaucoup a été anticipé, mais nous vivons une situation assez inédite et nous pourrions encore être surpris par les réactions de marché.
Enfin, il est tout de même important de souligner que dans le compte-rendu, bien davantage que ne l’a fait Jay Powell lors de la conférence de presse qui a suivi la dernière réunion du comité de politique monétaire, la majorité des membres se voulait assez prudente sur les possibles effets de la guerre en Ukraine sur l’activité économique. Ainsi, si d’aventure l’impact sur la croissance américaine venait à être plus important que prévu dans les mois qui viennent, nous pourrions voir une Fed moins agressive. Toutefois, pour l’instant, il faut retenir que le chemin à court terme est bien celui de banquiers centraux américains en tenue de combat contre la poussée de l’inflation.