La pénurie croissante d’employés qualifiés est une opportunité pour l’allemand Amadeus FiRe

La moitié des entreprises allemandes a réduit sa production l’an dernier, faute de main d’œuvre qualifiée1, un phénomène encore plus marqué dans les sociétés de service. Ce sont 77 milliards d’euros qui manquent à l’économie allemande, soit 2% du PIB. Cela ne devrait pas s’améliorer car la population allemande en âge de travailler devrait baisser de presque 10% au cours de la prochaine décennie selon Statista. Ce pays pourrait en effet perdre, chaque année, entre 350 000 et 500 000 personnes en âge de travailler en raison de l’évolution démographique.

L’Allemagne fait face à une problématique grandissante, appelée « Arbeiterlosigkeit » que l’on peut traduire par la pénurie d’employés. Parmi les nombreuses raisons de cette pénurie, la plus importante est le déclin démographique. Les personnes nées entre 1955-1965 commencent à prendre leur retraite en masse. En raison d’un taux de fécondité trop faible, il n’y a plus assez de travailleurs pour remplacer la génération sortante.

La hausse de l’immigration ne semblerait suffire à couvrir ce déficit, et la nécessaire formation des nouveaux entrants aux aptitudes recherchées étant chronophage, tandis que l’allongement du temps de travail, bien qu’efficace, ne serait être une solution durable.  

Dans le passé, le cycle économique était le facteur dominant sur la demande. Désormais, ce sont les candidats à l’emploi qui pèsent sur le rythme de la croissance.

     Source : Statista, janvier 2023.

Gay-Lussac Gestion, spécialiste des petites capitalisations européennes, a repéré Amadeus FiRe (FiRe pour Finanz und Rechnungswesen – comprenez Finance et comptabilité), une entreprise spécialisée dans le recrutement dans les métiers de la banque et de la finance. Le recrutement dans ce secteur de niche, estimé à 2,5 milliards d’euros par an, est plus résilient que le recrutement dans l’industrie, bien plus cyclique et hautement concurrentiel.

Amadeus FiRe est leader avec plus de 15% de parts du marché allemand devant des acteurs comme Robert Half, DIS ou Michael Page qui représentent ensemble environ 20% de ce marché atomisé. La société, au profil défensif, a bien traversé les crises des dernières décennies comme en 2009 où le groupe n’a connu qu’une baisse de 3,5% de son chiffre d’affaires avec cependant une augmentation de son résultat d’exploitation.

La société est basée à Francfort avec une présence dans plus de trente villes allemandes et une dimension online qui lui offre une visibilité accrue auprès des candidats et des entreprises. En plus d’une solide réputation depuis plus de 35 ans en Allemagne, le groupe couvre l’ensemble de la chaîne de valeur de son marché et peut faire jouer les synergies entre ses divisions pour développer ses ventes. L’offre du groupe comprend des formations diplômantes, des séminaires de formation en entreprise, des placements temporaires, des placements permanents, des services de conseil et de gestion de projets. Cette palette de services lui permet de gagner progressivement des parts de marché en se démarquant de la concurrence.

Amadeus FiRe a construit, selon Gay-Lussac Gestion, des avantages concurrentiels solides. En premier lieu, un réseau construit au fil des décennies grâce à son important vivier d’entreprises clientes qui attire mécaniquement les candidats à l’emploi, sachant qu’ils auront plus de chance de trouver un poste intéressant avec ce réseau d’entreprises. Les entreprises clientes continuent de travailler avec Amadeus FiRe pour bénéficier de ce vivier de candidats à l’emploi qui augmente. Ce portefeuille de clients et de candidats est difficilement réplicable. En second lieu, l’entreprise offre un accès différencié aux candidats qu’elle renforce, avec ses activités d’enseignement et de formation en accompagnant les jeunes diplômés pour les placer dans diverses entreprises. L’intégration de services par Amadeus FiRe lui donne un avantage concurrentiel qui facilite le placement de ses candidats et lui permet de mieux répondre aux besoins de ses clients.

Sur l’aspect financier, la société produit des retours sur capitaux employés supérieurs à 20% et a dégagé une croissance de son chiffre d’affaires de 10% annualisés au cours des quinze dernières années. L’amélioration progressive de la marge opérationnelle, actuellement autour de 16%, a été tirée en partie par l’éducation, un segment qui est mieux margé. Par ailleurs, la génération de trésorerie est assez régulière avec une conversion sur EBITDA[1] historiquement proche de 65%. La situation bilancielle est saine, selon la société de gestion, tandis que le management de la société, encouragé par des packages de rémunération variable bien ciblés, sait se montrer discipliné sur l’allocation du capital avec une politique de retour à l’actionnaire historiquement généreuse.

Pour Paul Edon, analyste buy-side chez Gay-Lussac Gestion, le cours d’Amadeus FiRe ne reflète pas encore la qualité intrinsèque de ce groupe ni son potentiel de développement, en dépit de la revalorisation du titre ces derniers mois. Le chiffres d’affaires de la société devrait continuer de croitre en 2023 dans ce contexte de récession modérée au regard de la pénurie d’employés qualifiés et de la demande toujours soutenue des entreprises. Par ailleurs, l’inflation des salaires et des taux horaires dans l’intérim profite à Amadeus FiRe dont les commissions sont indexées sur la valeur des contrats. A long terme, la proposition de valeur d’Amadeus FiRe devrait gagner en importance face à la pénurie croissante d’employés qualifiés.

Enfin, après quelques années de désendettement, à la suite d’opérations de croissance externe en 2019-2020, le groupe devrait terminer de rembourser toute sa dette en 2023. Cela laisse à l’équipe de direction une latitude pour revenir à une politique de dividende plus favorable à l’actionnaire, comme dans le passé, voire pour continuer à consolider le marché atomisé de la formation. La croissance annualisée de cette dernière devrait dépasser, selon Gay-Lussac Gestion, 10% au cours des prochaines années. Une tendance qui devrait profiter à Amadeus FiRe qui détient 10% de parts de marché.

Si la thèse développée par Gay-Lussac Gestion devait se confirmer, le cours pourrait atteindre voire dépasser 170 euros.

Sources :

1 : Selon la Chambre de Commerce et d’Industrie allemande (DIHK),

Termes et définitions
1. EBITDA ( EBITDA ) L’EBITDA (Earnings Before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization) est une mesure de la performance financière d’une entreprise. En…
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