- La volatilité sur les marchés reste forte. Celle-ci provient du nombre d’incertitudes qui planent sur la trajectoire de l’économie mondiale. Néanmoins, l’inquiétude qui domine est celle de l’éventuelle entrée en récession de l’économie mondiale, en commençant par l’Europe et les Etats-Unis. La persistance d’une inflation élevée, même si celle-ci devrait commencer à reculer sous la dissipation de quelques effets de base, et la volonté des banquiers centraux de s’assurer que les pressions inflationnistes se dissipent vite en accélérant le resserrement monétaire sont considérés, à juste titre, comme des éléments de risques sur les perspectives de croissance. Il nous semble encore prématuré d’envisager une contraction de l’activité des deux côtés de l’Atlantique à court terme, sans choc négatif supplémentaire, comme une coupure de l’approvisionnement de gaz de l’Europe par la Russie.
- Toutefois, ce qui nous semble acquis est la poursuite d’une décélération de l’activité, laissant derrière nous le très fort épisode de croissance que nous avons connu pour combler, voire dépasser le choc brutal de la pandémie. Cette décélération est accentuée par la poussée inflationniste et le resserrement des conditions monétaires. Dans un tel contexte, cela a du sens d’être prudent au niveau de la prise de risque sur les marchés. En particulier, les survalorisations de certains actifs provoquées par l’expansion monétaire historique que nous avons connue ainsi que la stimulation budgétaire que nous avons expérimentée vont en partie être corrigées. Il est toujours difficile de prévoir l’ampleur de cette correction. Cependant, dans cette phase d’incertitude, il nous semble que garder le cap vers des valeurs dont les valorisations sont raisonnables est toujours logique. Aussi, saisir les opportunités de court terme qui seraient décorrélées du cycle général est aussi judicieux. C’est pour cela que nous gardons une exposition en Chine, qui malgré de nombreux questionnements sur la stratégie à long terme des autorités, devrait offrir dans les mois à venir un changement d’orientation qui devrait attirer l’appétit des investisseurs avec un rebond marqué de l’activité.
- Dans l’exercice que nous menons tous, de scruter le ciel économique pour voir si des nuages menaçants sont en train d’annoncer un ouragan pour l’économie mondiale, comme nous l’a prédit récemment le Président de JP Morgan, nous continuons de constater la résilience de l’activité, même si la tendance est évidemment à la décélération.
- Comme chaque début de mois, les statistiques sur l’état de l’économie mondiale, au travers des enquêtes PMI[1] auprès des entreprises, nous ont donné leur verdict sur la capacité de l’appareil productif à encaisser les nombreux chocs qu’il subit. Il se trouve que l’activité reste relativement résiliente que se soit dans le secteur manufacturier comme dans les services, même s’il y a, comme attendu, une perte de vitesse. Evidemment, la Chine, reste un maillon faible, subissant le choc massif du confinement. Néanmoins, le pays est, enfin, en train de sortir de l’enfermement et donc devrait retrouver la croissance.
- Aussi, avec les regards toujours orientés sur la dynamique de la principale économie mondiale, on a pu constater que les Etats-Unis continuent de bénéficier d’un marché de l’emploi qui reste très porteur. Avec 390 000 créations d’emplois sur le mois de mai, un chiffre supérieur aux attentes, et un taux de chômage toujours à 3,6%, soit proche du plus bas depuis plus de 50 ans, on reste dans une dynamique forte. Evidemment, on s’attend à un fléchissement dans les trimestres à venir, mais à ce stade, il nous semble prématuré de considérer qu’à coup sûr nous nous dirigeons vers une récession, dont d’ailleurs l’ampleur est encore plus difficile à évaluer.
Aux Etats-Unis, le marché de l’emploi a encore surpris par sa robustesse. En effet, au cours du mois de mai 390 mille emplois ont été créés, au-dessus des attentes des analystes, dont 333 mille dans le secteur privé. Les créations ont été fortes dans presque tous les secteurs de l’économie, avec une contribution significative, même si en retrait par rapport aux mois précédents, des activités de loisirs ou d’hébergement qui continuent de bénéficier de l’ouverture de l’économie après l’épisode de contagions du début d’année.
Au total, le taux de chômage est resté inchangé à 3,6%, soit proche du niveau le plus bas atteint en 2019 (3,5%). Un chiffre jamais atteint depuis plus de 50 ans. C’est dire combien le marché du travail reste tendu.
En même temps, cette robustesse semble avoir attiré des nouveaux entrants, avec un taux de participation qui a légèrement remonté à 61,3%, mais qui reste en retrait par rapport au chiffre d’avant crise sanitaire d’un peu plus d’un point de pourcentage.
Aussi, la dynamique reste favorable au regard des offres d’emplois toujours très abondantes, comme l’a reflété l’enquête des emplois disponibles. Nous avons toujours un nombre extraordinaire d’emplois offerts.
En même temps, il semble bien que certaines tensions s’apaisent. Du moins, c’est ce qu’on est tenté de déduire de la légère modération de la progression des salaires au cours du mois. Il nous faudra toutefois attendre la fin du trimestre pour voir si cette décélération est confirmée par les statistiques plus précises du coût du travail.
Evidemment, tout le monde regarde avec attention les statistiques sur le maché du travail pour percevoir des indices de la récession que beaucoup veulent anticiper. Il est vrai qu’il a plein de raisons de croire à la possibilité d’une possible contraction de l’activité des deux côtés de l’Atlantique compte tenu de l’accélération forte de l’inflation et du changement radical de la politique monétaire. L’histoire des épisodes inflationnistes, nous dit que souvent le combat contré les poussées inflationnistes se sont mal terminées.
Néanmoins, à ce stade, même si cela risque d’être difficile, on ne peut pas exclure l’atterrissage en douceur des économies. Par « douceur », il ne faut pas entendre que les économies ne connaissant pas un ralentissement fort de l’activité, mais plutôt qu’il n’a pas de dynamique récessionniste, c’est dire une destruction de capital plus au moins violente.
Aujourd’hui, quoi qu’il en soit, il est clair que l’inquiétude monte comme nous le montre la montée de recherches sur le terme récession dans Google.
Néanmoins, au regard de l’emploi, en utilisant par exemple la mesure simple de Claudia Sahm, ancienne économiste au sein de la Fed, pour déterminer la possible entrée en récession, nous n’y sommes toujours pas.
Par ailleurs, les indicateurs d’activité PMI dans les services sont venus compléter en fin de semaine dernière ceux du secteur manufacturier. Il est ressorti que l’activité globale reste relativement résiliente (hors Chine), même si toujours en décélération dans des nombreux pays. Evidemment, la contraction de l’économie chinoise sur les derniers mois pèse sur l’activité mondiale, et est la principale cause de la baisse de l’indice global au cours des derniers mois. Mais ceci devrait changer dans les mois à venir.