L’inflation se rapproche de l’objectif d’inflation de la BCE et le Conseil des gouverneurs est désormais unanimement préoccupé par l’inflation et le risque d’un effet de second tour dans la zone euro (c’est-à-dire la répercussion de la hausse des prix du pétrole sur les salaires entraînant une spirale d’augmentation prix salaires).
En conséquence, Christine Lagarde, la président de la BCE, a reconnu qu’une hausse des taux en 2022 n’est plus exclue. Les décisions de la BCE dépendront désormais des projections de mars 2022 et elle se tient prête à adapter ses instruments si nécessaire. La réunion de mars sera cruciale, un recalibrage de la politique monétaire pourrait être annoncé. En mars, la BCE mettra fin au PEEP (programme d’achats d’urgence face à la pandémie) comme prévu, mais la banque centrale pourrait également réévaluer les achats nets d’actifs dans le cadre de l’APP (programme d’achats d’actifs) et ouvrir la porte à la fin des achats nets d’obligations dès le quatrième trimestre et à une hausse des taux peu après.
La situation est difficile pour la BCE car l’inflation est alimentée par la flambée des prix de l’énergie et la fragmentation économique reste une préoccupation majeure. Une réduction de l’accommodation monétaire profiterait à certains pays tandis que d’autres seraient négativement impactés. Par exemple, la probabilité d’effets de second tour est plus élevée dans des pays comme l’Allemagne qui est au plein emploi et prévoit d’augmenter son salaire minimum de 25%. Cela pourrait stimuler la croissance globale des salaires dans l’ensemble de l’économie allemande et contribuer à des pressions salariales plus larges, d’où la nécessité d’une hausse des taux pour maîtriser l’inflation. En revanche, les pays périphériques ont besoin d’une politique monétaire accommodante. Des hausses de taux en 2022/2023 signifieraient un arrêt de la politique d’achat d’actifs de la BCE, tandis que l’impact positif du fonds de relance de l’Union européenne (UE) ne sera visible sur les fondamentaux des pays qu’à moyen terme. Et en attendant, les conditions de financement doivent rester accommodantes pour soutenir la reprise de l’investissement privé et permettre un financement bon marché de la dette.
Selon nous, la BCE augmentera ses taux directeurs fin 2022 ou début 2023. Cependant, la hausse du taux directeur de la BCE se fera au détriment de la stabilité des spreads. Nous maintenons notre position de forte prudence sur les émetteurs périphériques. La BCE utilisera la flexibilité de réinvestissement du PEPP mais nous ne sommes pas sûrs que cela suffira à empêcher la volatilité des spreads.