Le dynamisme des services commencerait-il à s’essouffler ?

  • Les marchés sont incertains à l’approche des réunions de la Fed et de la BCE de la semaine prochaine, surtout après que la banque centrale australienne ait de nouveau monté ses taux hier alors qu’elle avait précédemment annoncé une pause. Cela dit, la fin de la saga sur le plafond de la dette publique aux Etats-Unis, l’annonce de rencontres entre les autorités américaines et chinoises et des premières mesures de soutien économique en Chine soutiennent un peu l’appétit pour le risque.
  • D’un point de vue conjoncturel, les premiers signes d’affaiblissement de l’activité dans les services pourraient indiquer que les perspectives de croissance mondiale restent faibles, ce qui est notre scénario pour la seconde partie de l’année. La bonne tenue de la croissance mondiale depuis le début l’année vient de la forte dynamique de la consommation de services, portée par le dynamisme de l’emploi, la baisse du prix de l’énergie et la réorientation de la demande des biens vers les services. Cela a compensé la faiblesse de l’activité industrielle, de l’investissement des entreprises et de la construction dans la plupart des pays. Ce n’est pas étonnant car la demande de services est moins sensible aux resserrements monétaires que les autres pans de l’économie. Mais il nous semble que cela constitue une fragilité pour le cycle économique.
  • C’est pourquoi la forte baisse de l’ISM services[3] américains en mai est un mauvais signe. L’ISM[7] services américain baisse de façon inattendu, de 51,9 en avril à 50,9pt. Il reste au-dessus de la marque des 50 points mais est au plus bas depuis trois ans (si l’on exclut la chute temporaire de décembre dernier). Bien sûr, il ne faut pas surréagir à une seule donnée, d’autant que l’emploi dans les services a encore nettement progressé en mai. Mais c’est à suivre de près.
  • En Zone Euro, la croissance reste limitée en avril avec une stagnation des ventes au détail et une nouvelle baisse des commandes en Allemagne. Surtout, les PMI services[4] baissent pour la première fois en mai, même s’ils restent nettement en zone de croissance. Nous anticipons une croissance positive mais limitée de la Zone Euro dans les prochains trimestres.
  • Pour la Chine, les PMI[8] privés augmentent en mai, contrairement aux PMI officiels. Surtout, les autorités ont annoncé des premières mesures de soutien depuis vendredi, même si ces mesures restent limitées. Cela réduit un peu les craintes sur la faiblesse de la reprise à court terme.

Les premières données d’activité pour le 2ème trimestre en Zone Euro sont mitigées, suggérant que le retour à la croissance après la stagnation de l’hiver est limité et reste très concentré sur la consommation de services. Les ventes au détail stagnent en avril après une baisse de 0,5% en mars. Elles commencent donc le T2 0,3% sous leur niveau moyen du T1 et sont désormais 4,5% sous leur tendance pré-Covid. Contrairement aux Etats-Unis, la consommation de biens s’est plus que normalisée après son rebond post-Covid. Par ailleurs, l’industrie reste faible en avril si l’on en croit la baisse inattendue de la production en Espagne et la poursuite de la baisse des commandes de biens durables en Allemagne (-0,4% après -10,9% en mars). Cela suggère que la demande extérieure reste dégradée.

Fig. 1 Zone Euro : Les PMIs baissent un peu en mai, et de façon plus marquée en Italie

La baisse des PMIs services de la Zone Euro en mai après leur fort rebond depuis 6 mois suggère que le rebond des services grâce au contre-choc énergétique commence à s’essouffler, notamment en Italie. Le PMI final de la Zone pour mai baisse plus qu’attendu, passant de 54,1 en avril à 52,8pt. Il reste à un niveau satisfaisant mais baisse pour la première fois depuis octobre. Et si la baisse du PMI est assez généralisée, elle est particulièrement marquée en Italie. Le PMI composite[5] Italien passe de 55,3 à 52,0pt. Il reste donc en territoire de croissance mais passe sous la PMI de la Zone Euro pour la première fois depuis octobre. Au contraire, le PMI espagnol baisse moins que celui de la Zone Euro et reste élevé à 55,2pt.


Fig. 2 Zone Euro : Les investisseurs anticipent une poursuite de la baisse de la confiance en juin

La confiance des investisseurs dans la Zone Euro continue de baisser début juin d’après le Sentix, suggérant que le ralentissement de l’activité en Zone Euro en mai n’était pas un événement isolé et donc que la croissance restera faible cet été. Si cet indicateur est à prendre avec des pincettes, il a historiquement bien indiqué les retournements cycliques. Or il baisse nettement pour le second mois consécutif.

Fig. 3 Etats-Unis : la confiance dans les services baisse nettement en mai d’après l’ISM

L’ISM services américain baisse de façon inattendu en mai, de 51,9 en avril à 50,9pt. Il reste au-dessus de la marque des 50 points mais est au plus bas depuis trois ans (si l’on exclut la chute temporaire de décembre). Vu que l’ISM manufacturier[1] a de nouveau baissé en mai, l’ISM composite, qui représente la dynamique dans l’ensemble de l’économie, passe sous les 50 pt seulement pour la seconde fois depuis le début de la reprise post-Covid. Surtout, les indicateurs de demande se détériorent fortement (commandes, stocks…) et l’emploi se contracte alors même que l’activité dans les services reste encore positive. Au total, la résilience de la production et de l’emploi en mai suggère que la croissance américaine résiste encore au T2 mais la baisse des indicateurs avancés[2] renforce notre conviction que l’économie va ralentir plus fortement dans les prochains mois.
La bonne nouvelle, qui est liée à la dégradation de la demande de services, est que la composante prix de l’ISM service est au plus bas depuis trois ans et est en ligne avec son niveau pré-Covid. Cela soutient notre idée que l’inflation dans les services devrait commencer à baisser très graduellement dans les prochains mois si l’activité ralentit comme nous l’anticipons.

Fig. 4 Chine : Les PMIs sont mitigés en mai mais indiquent globalement une reprise limitée

Au contraire, les PMIs privés pour la Chine (de Caixin[6]) augmentent dans le secteur manufacturier comme dans les services, poussant le PMI composite à un plus haut depuis plus de deux ans à 55,6pt. C’est plus rassurant que les PMIs officiels qui baissent de nouveau en mai et sont déjà repassés sous leur moyenne de long terme, seulement 5 mois après le début de la réouverture. Malheureusement, les PMIs officiels sont probablement de meilleurs indicateurs de la conjoncture générale en Chine, puisqu’ils couvrent plus d’entreprises, des entreprises plus grosses et dans plus de secteurs. Cela dit, le PMI services de Caixin permet peut-être de mieux capter la dynamique de la consommation des ménages. Par ailleurs, la demande extérieure continue de se dégrader en mai vu la nouvelle baisse des exportations (-7,5%). Au total, la reprise de la Chine semble bien continuer mais seulement grâce à la consommation et donc avec une ampleur et un souffle limité.
Cela explique pourquoi les autorités chinoises commencent à augmenter légèrement leur soutien à l’économie, sans toutefois annoncer de stimuli massifs comme elles ont pu le faire par le passé. Depuis la fin de semaine dernière, les autorités ont annoncé des assouplissement des règles sur les achats immobiliers dans certaines villes secondaires et ont demandé aux banques de baisser la rémunération des dépôts des ménages. Nous pensons que les autorités feront le minimum possible pour garantir que la reprise économique se poursuive à court terme, même si les perspectives à moyen terme restent limitées.

    Termes et définitions
    1. ISM manufacturier ( ISM manufacturier ) L’indice ISM manufacturier est un indicateur économique qui mesure le niveau d’activité des manufacturiers aux États-Unis. Il est…
    2. indicateurs avancés. Les indicateurs avancés sont des outils utilisés pour analyser les données financières et les performances d’une entreprise. Ils…
    3. ISM services ( ISM services ) L’indice ISM Services est un indicateur économique qui mesure la santé des services aux États-Unis. Il est composé…
    4. PMI services ( PMI services ) Le PMI des services, ou Indice des Directeurs d'Achat pour le secteur des services (Purchasing Managers' Index for Services), est un indicateur économique similaire au PMI manufacturier, mais il se concentre sur le secteur des services.
    5. PMI composite ( PMI composite ) Un indice PMI composite est un indicateur économique qui combine les données des indices PMI manufacturier et des services pour fournir une vision plus complète et globale de l'activité économique.
    6. Caixin ( Caixin ) Caixin est un média chinois réputé pour son journalisme indépendant et approfondi, en particulier dans le domaine de…
    7. ISM ( ISM ) L’indice ISM, également connu sous le nom de rapport sur l’activité manufacturière de l’Institute for Supply Management (ISM),…
    8. PMI ( PMI ) L'indice PMI (Purchasing Managers' Index) est un indicateur mensuel qui mesure la performance des secteurs de l'industrie manufacturière et des services.
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