Le scénario de 2022 se joue aussi en Chine

Chinois | Les actualités économiques et financières

Géopolitique, inflation, croissance, la Chine détient bon nombre des clés de l’évolution à venir de l’économie mondiale.

L’irruption de la guerre en Europe a bouleversé les prévisions pour 2022. Jusqu’ici plutôt optimistes, tous les organismes internationaux révisent leurs cibles, à la hausse pour l’inflation, à la baisse pour la croissance, la faute aux incertitudes géopolitiques croissantes et à l’envolée des coûts des matières premières.

Si elle n’échappe pas à la morosité ambiante, la Chine possède plusieurs leviers d’actions qui peuvent infléchir le scénario économique et financier de cette année.

Le premier levier est géopolitique. Le 4 février dernier, quelques heures avant l’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver à Pékin, Xi Jinping et Vladimir Poutine affichaient leur volonté d’étendre et de renforcer leur partenariat face à l’Occident perçu comme inféodé aux Etats-Unis.

L’invasion de l’Ukraine, vingt jours plus tard, n’a pas rompu en apparence cette belle entente. Le 6 mars 2022, le ministre des Affaires Étrangères Wang Yi soulignait que « le partenariat entre la Chine et la Russie est solide comme un roc ». Néanmoins les choses semblent plus complexes. La Chine a par exemple refusé de livrer à la Russie des pièces détachées pour l’entretien de ses avions. En outre, stratégiquement, son opposition à l’Inde ou au Vietnam, largement équipés par la Russie, sont des obstacles à un partenariat militaire effectif et durable.

Économiquement, le partenariat avec la Russie peut permettre à la Chine d’avoir accès à des matières premières à moindre coût. Mais, faute de pipeline, les volumes de gaz et de pétrole resteront limités. Et la Chine n’a pas intérêt à se voir d’une quelconque façon associée à la Russie et de subir des sanctions collatérales : si Pékin est le premier partenaire commercial de Moscou, celui-ci n’est que le 18ème en sens inverse, la Russie ne représentant que 3% de ses importations et 2% de ses exportations.

L’Empire du Milieu pourrait donc jouer un rôle de « stabilisateur » géopolitique envers les velléités de son voisin par sa simple inertie. De quoi freiner peut-être à moyen terme les ardeurs guerrières de Vladimir Poutine.

Le second levier a trait à l’inflation. Celle- ci a explosé pour atteindre presque 8% aux Etats-Unis en rythme annuel et 5% en Europe. Elle est largement liée à des perturbations de l’offre. Compte tenu du dynamisme de la consommation des deux côtés de l’Atlantique, on peut considérer qu’environ 5% sur les 8% américains et 3,5% sur les 5% européens sont liées à l’offre, le reste à la demande.

Or l’action des banques centrales, annoncée comme puissante pour la Fed qui a déjà initié le mouvement, plus prudente pour la BCE, est dirigée principalement sur la demande, via le crédit. Elles sont largement impuissantes lorsque l’inflation provient de l’offre.

La Chine peut fluidifier l’offre mondiale – et donc apaiser l’inflation – en jouant sur deux volets :

Le premier volet est le sanitaire, en relâchant progressivement les normes de sa politique de « zéro-Covid » qui provoque l’embolie des ports et des usines du pays et grippe les chaines d’approvisionnement de la planète.

Malgré un crédo toujours réaffirmé, il semble bien que la doctrine du pays évolue, de plus en plus de voix s’élevant dans le corps médical pour une redéfinition de la norme. En décembre dernier Liang Wannian, un épidémiologiste des plus renommés, a ainsi déclaré aux médias officiels chinois que l’avenir était à une politique de « zéro dynamique », plus flexible que l’actuelle. Et l’approche à Shenzhen en mars 2022 était en ligne avec cette nouvelle approche, avec la création de « bulles » permettant à l’économie de continuer à fonctionner malgré le virus.

Le second volet est lié aux discussions commerciales en cours avec l’administration Biden pour lever une partie des taxes qui pèsent sur le commerce entre les deux pays. Longtemps impensable au regard de la rivalité entre les deux pays, une issue positive – évidemment partielle – parait envisageable à court terme, ce qui permettrait de redonner une impulsion aux échanges entre les deux pays.

Le troisième et dernier levier entre les mains chinoises est celui de la croissance. Le ralentissement de l’activité est très prononcé depuis mi-2021 et désormais beaucoup doutent de l’atteinte de l’objectif officiel des 5,5% de croissance en 2022. Notre indicateur Montpensier MMS de Momentum économique, à 45 reste en retrait depuis de nombreux mois.

Lire la suite

Prev
Marchés : quel premier trimestre ! Quel deuxième trimestre ?
Next
Semaine de l’Epargne Salariale : retour sur la conférence de Gay-Lussac Gestion
+ Pour aller plus loin