La victoire d’Emmanuel Macron aux présidentielles face à Marine Le Pen ne doit pas faire oublier les fractures de la société, et la nécessité d’accélérer sur deux enjeux : le pouvoir d’achat et la transition écologique.
Emmanuel Macron a été réélu pour un second mandat face à Marine Le Pen avec 58,55 % des voix.
Les Français ont donc voté majoritairement pour le projet pro-européen et la nécessité d’une accélération de la transition énergétique. Néanmoins, l’analyse des résultats souligne les fractures profondes de la société française, et gouverner ne sera pas aisé. La feuille de route du second mandat s’inscrit dans la continuité du premier avec deux enjeux majeurs issus des élections : le pouvoir d’achat et la transition écologique.
Les principales réformes envisagées concernent la réforme des retraites (âge de départ de 62 à 64 ans ; prise en compte des carrières longues et de la pénibilité), la refonte du RSA (transformé en revenu d’activité en contrepartie d’heures) et plus généralement du marché du travail. La revalorisation des métiers de la fonction publique et l’indexation des retraites sont envisagées. La fiscalité continuera d’être allégée à la fois pour les entreprises (impôts de production) et les ménages. Enfin, dans les investissements d’avenir, on retiendra l’investissement dans la transition énergétique – capacités de production, rénovations thermiques – et dans l’innovation. Le budget militaire sera augmenté en réaction au nouveau désordre mondial.
Ce scénario budgétaire risque de se heurter à un fort sentiment de défiance des Français au regard du sentiment de déclassement, de perte de pouvoir d’achat et de fracturation des territoires (entre métropoles et campagnes), alimenté par la disparition des services publics ou de proximité comme la santé et la sécurité.
Le programme du candidat réélu, dont l’institut Montaigne a estimé qu’il conduisait à un déficit de 44,5 milliards d’euros par an (12,7 Mds€ d’économies, dont 7,7 Mds€ sur le régime des retraites, et 57,2 Mds€ de dépenses) se heurte au niveau d’endettement de la France (112,9 % du PIB) à la difficulté à réformer, ainsi qu’à la charge de la dette qui pourrait se dégrader en cas de tensions sur les taux, et obérer les marges de manœuvre budgétaires. La trajectoire de retour vers un déficit inférieur à 3 % d’ici 2027 reste une gageure car cela nécessiterait un effort budgétaire pluriannuel de 15 milliards par an, avant même que les attentes de pouvoir d’achat soient satisfaites. L’amélioration du taux d’emploi salarié reste donc déterminante pour résoudre l’équation.
Le programme du candidat réélu, […] se heurte au niveau d’endettement de la france, à la difficulté à réformer, ainsi qu’à la charge de la dette qui pourrait se dégrader en cas de tensions sur les taux, et obérer les marges de manœuvre budgétaires.
Justement, concernant les taux d’intérêt, la situation s’est fortement dégradée depuis le début de l’année avec une contreperformance comparable aux années 1987 et 1994. Ceci est lié à l’inflexion des banques centrales, qui ont fait un virage à 180° depuis l’année dernière, et multiplient des prises de paroles soulignant l’occurrence puis l’amplification d’un resserrement monétaire (hausse des taux, réduction de la taille du bilan). L’explication principale tient aux perspectives de resserrement monétaire, particulièrement aux Etats-Unis. Ce changement de tendance s’explique aussi et paradoxalement par la guerre en Ukraine, qui aurait dû, en tout cas en Europe, provoquer un “flight to quality”, mais dans la balance des risques le choc positif d’inflation a nettement surpassé le choc négatif de croissance.
Les incertitudes sont donc grandes à court terme, même si la dynamique croissance/inflation devrait s’inverser d’ici l’été.