Stress bancaire : quelles observations un mois après ?

La faillite de la SVB, puis le mariage forcé entre UBS et le Credit Suisse ont jeté un froid sur le système bancaire. Le stress financier tel que mesuré par différents indicateurs demeure pourtant contenu et régresse même depuis 2 semaines. L’activité bancaire américaine semble malgré tout avoir subi quelques secousses, qui tendent néanmoins à s’apaiser.

Avec un peu plus d’un mois de recul maintenant, quelles sont les premières observations à tirer de ces événements ?

Depuis la faillite de la SVB (le 10 mars dernier), les données remontées par le secteur bancaire américain commencent peu à peu à s’accumuler. En épluchant ces dernières, trois faits saillants émergent : (i) les dépôts bancaires ont fortement augmenté pendant la crise sanitaire avant d’atteindre un pic à la fin du T1 2022 ; les liquidités déposées au sein de ces établissements décroissent désormais à un rythme plus soutenu, (ii) la tendance de ces retraits est cependant de moins en moins vigoureuse, indiquant un apaisement progressif de la situation sur la période récente, (iii) les agents économiques redirigent notamment ces sommes vers les fonds monétaires, dont les rendements ont nettement progressé en raison des hausses de taux menées par la Fed. En première intention, ce phénomène pourrait pousser les banques à limiter leur prise de risque en accentuant la restriction des conditions de crédit, qui s’observait déjà au dernier trimestre 2022. La Fed bénéficierait ainsi d’un resserrement monétaire « gratuit », bien que son ampleur soit encore à déterminer en équivalent hausses de taux implicites supplémentaires (+0,25 %, +0,50 %, ou +0,75 % ?). Par ramification, un effet ralentisseur sur la croissance, et in fine sur l’inflation se ferait ressentir, ce qui faciliterait le travail de la Fed, de manière incontrôlée toutefois.

En parlant d’inflation justement, celle dite « totale » poursuit sa phase de décélération aux États-Unis en passant de 6 % sur 12 mois fin février à 5 % en mars, tandis que l’inflation cœur (hors énergie et alimentation) persiste à 5,6 % sur la même période. En étendant l’analyse à l’allure de cette dernière sur 1, 3 et 6 mois, tout concorde cependant avec l’enclenchement d’une phase de désinflation. Malgré tout, la cible des 2 % visée par la Fed reste encore lointaine, d’autant que l’activité et le marché du travail ne se refroidissent que très lentement. Les indicateurs « haute fréquence » de consommation des ménages (utilisation des cartes de crédit…) suggèrent même un regain en avril après le creux lié au stress bancaire. Le discours des autorités monétaires est désormais plus prudent, avec même des dissensions lors des différentes prises de parole des membres de la Fed. Comme nous le mentionnions l’an dernier, le spectre d’une inflation volatile comme dans les années 70 hante toujours l’esprit de l’institution, auquel se sont ajoutés les fantômes de la crise f inancière de 2008. Les relèvements de taux devraient néanmoins se poursuivre encore une à deux fois. Viendra ensuite le temps d’apprécier les effets de la politique monétaire, qui s’observent avec un délai « long et variable ».

Penchons-nous maintenant sur la zone Euro. Comme aux États-Unis, l’inflation totale y décélère sous l’influence de la baisse des prix de l’énergie, mais l’inflation cœur continue d’avancer à vive allure. Cette dynamique, qui illustre une forme de divergence transatlantique, se perçoit également sur l’activité économique où l’essoufflement est beaucoup plus palpable. Cette dichotomie se matérialise, à nouveau, sur le comportement des banques centrales. Si la Fed dispose d’une position plus confortable du fait d’un resserrement monétaire plus précoce, d’indicateurs d’emploi et d’inflation qui s’apaisent (très) doucement, la BCE n’a pas ce luxe. L’épisode SVB et Credit Suisse, dont les impacts semblent limités pour le vieux continent, a été digéré par les officiels qui multiplient les interventions médiatiques en faveur d’un resserrement monétaire musclé, évoquant même l’idée d’une 4ème hausse de 0,50 % pour la réunion de mai prochain.

Le stress bancaire n’a finalement que peu modifié (à ce stade) l’ardeur des banquiers centraux et le panorama macroéconomique global. Ces événements interviennent à un moment où la situation commençait peu à peu à s’éclaircir pour la Fed, qui se différencie désormais assez sensiblement de son homologue européenne.

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